Une consanguinité nantaise ?

José et Claude Arribas

Le FCN est une grande famille dans laquelle il est difficile d’entrer…

Cette phrase courte, définitive, on l’a souvent lue ou entendue, écrite ou prononcée par des journalistes sportifs en manque d’arguments pour expliquer l’échec de certains joueurs de talent venus de l’extérieur.

Certes, le Football Club de Nantes faisait preuve d’un esprit familial plus développé qu’actuellement, c’est bien le moins que l’on puisse en dire, mais il serait erroné de croire que la sélection se faisait à Nantes sur des critères uniques d’appartenance à “la” famille. Non, la vérité du terrain prévalait,  celle des entrainements au Parc de Procé, aux Basses Landes ou à la Jonelière. Le football qui y était alors pratiqué n’avait que peu d’équivalent au monde et requérait une combinaison complexe de qualités pour le footballeur appelé à le pratiquer. Certains y parvenaient, d’autres (ne manquant pas de talent pourtant) s’y cassaient les dents et les ambitions. On n’improvisait pas aussi facilement des automatismes que les apprentis du centre de formation avaient mis des années à assimiler, voilà tout !

Certains ont cru bon récemment de railler ce savoir faire qui a élever la maison jaune et verte au rang de modèle, parfois copié, rarement égalé, en le réduisant à une vulgaire notion de consanguinité, laissant supposer une dégénérescence voire une  tare incompatible avec la pratique du football d’aujourd’hui. Ils disent posséder une méthode, meilleure, soit…

L’histoire jugera…

Cependant j’ai voulu vérifier s’il a existé véritablement une exception nantaise quant à une multiplication anormale de liens familiaux entre joueurs, entraineurs et dirigeants ?

Eric Pécout est le cousin de Philippe Gondet, c’est vrai !

Rien de bien extraordinaire jusque là je vous l’accorde ! Les deux cousins faisant tous les deux le bonheur du FCN par les nombreux buts qu’ils inscrivirent sous nos couleurs. Ils poussèrent même l’analogie jusqu’à devenir buteurs pour l’équipe de France dans leurs époques respectives. Philippe et Eric possédait tous les deux le groupe sanguin si rare des buteurs d’exception, mais loin d’être un handicap ce sang là a plutôt fait le bonheur du football nantais.

Les filiations, voilà qui est plus intéressant !

Nous avons coutume de considérer que Raynald Denoueix était l’héritier de Coco Suaudeau lui même fils spirituel de  Saint José, certes…

Mais il ne saurait être question de sang dans cette histoire ! Les ethnologues parleront simplement et tout au plus de filiation adoptive ! Une filiation dont on aurait bien dû s’inquiéter avant de renvoyer prématurément le dernier détenteur du Saint Graal bâtir des chateaux en Espagne puis enseigner la science du ballon rond sur les plateaux de télé. Son savoir faire nous serait encore bien utile aujourd’hui pour continuer d’espérer en un FC Nantes d’exception et de tradition.

Mais faisons fi de ces filiations adoptives !  Les liens du sang, voilà ce qui nous intéresse vraiment !

Le cas de la famille Arribas est à ce titre remarquable et complexe.

José étant le géniteur et l’entraineur de Claude, on peut aisément imaginer l’embarras du papa lorsqu’à partir de 1967 le fiston commença à toquer à la porte de l’équipe première. Claude était suffisamment talentueux pour espérer faire une bonne carrière professionnelle mais pas suffisamment exceptionnel pour s’éviter la dure concurrence au sein de l’un des meilleurs effectifs de l’hexagone à cette époque.  Nul doute que José connut quelques nuits blanches et nombre de choix cornéliens jusqu’à ce que Claude y mette un terme en quittant le club sitôt le titre de champion de France 1973 empoché.

Beaucoup plus simple est la filiation de la famille Muller. Ramon remporta le titre de champion de France à deux reprises en 1965 et 1966 avec le FC Nantes, c’est donc naturellement qu’il revint voir Coco Suaudeau quelques années plus tard, lorsqu’alors retiré du côté de St Brieuc, Ramon décela quelques unes de ses nombreuses qualités chez son fils Oscar. Bien lui en a pris car Oscar dépassera son glorieux papa quant au nombre de titres qu’il remportera avec les canaris. Il fut titré 3 fois champion de France (1977, 1980 et 1983) et gagna surtout cette Coupe de France (1979) que papa Ramon avait vu passer sous son nez en 1966.

Muller

Oscar eut même la joie de partager ses victoires du début des années 80 avec le fils de l’un des équipiers de son papa : José le fils de Bako Touré.

Bako dont la carrière fut entravée par une blessure mal soignée du côté de Nancy, la ville qui a vu naître l’enfant prodigue. Bako, considéré perdu pour le football mais que le FCN a réussi temporairement à remettre sur pied, juste le temps d’être sacré champion de France (1966) avant de partir du côté de Blois. Et c’est justement de Blois que Bako, comme Ramon depuis St Brieuc, enverra José parfaire sa formation en Loire-Atlantique.

Bako

Bako le père de José

José le surdoué, le brésilien, le magicien… Les qualificatifs élogieux n’ont pas manqué pour vanter les qualités du jeune meneur de jeu nantais du début des années 80. Malheureusement, la carrière du fils sera marquée comme celle du père du sceau des blessures. Surtout cette terrible rupture des ligaments croisés en ce soir maudit de Coupe d’Europe contre l’Inter Milan en 1986, une nuit durant laquelle José perdra beaucoup plus que quelques degrés de flexion à l’un de ses genoux, dont il se ressentira pour le restant de sa carrière. Jamais il n’atteindra la dimension mondiale qui lui était promise à l’aube de la Coupe du Monde mexicaine.

Il devait atteindre le nirvana du ballon rond, c’est à une descente aux enfers qu’il a eu droit.

José

José le fils de Bako

Les liens du sang, les frères et soeurs les partagent également, examinons donc cet autre aspect de la famille du FC Nantes.

La plus célèbre des fratries du club concerne évidemment Marcel Desailly. Le jeune Marcel, alors pensionnaire du centre de formation, avait 16 ans quand son demi-frère, Seth Adonkor, titulaire d’une des meilleures équipes que le FCN ait jamais possédée, se tuât dans un terrible accident de la route qui a marqué la mémoire des supporters canaris. Jamais on ne verra les deux frangins fouler ensemble la pelouse de la Beaujoire sous le maillot nantais, néanmoins nul doute qu’une des pensées de Marcel allait vers son frère quand il entamât, deux ans plus tard, une carrière professionnelle allait l’élever au sommet du football mondial.

Seith et Marcel

Une dizaine d’années auparavant deux autres frères originaires de la Suze s/Sarthe les avaient précédés : Jean-Claude et Patrice Osman.

Les Osman

Les frères Osman

L’ainé, Jean-Claude, “la rouille” comme on l’appelait alors, était un latéral en avance sur son temps. Il n’hésitait pas à faire profiter l’équipe de sa pointe de vitesse, se taillant ainsi une réputation de contre-attaquant de grande classe qui dépassa les frontières de l’hexagone. On dit que Stefan Kovacs alors en charge du grand Ajax n’était insensible aux qualités du jeune nantais. D’ailleurs le technicien roumain se rappelera  de Jean-Claude quelques années plus tard quand, devenu sélectionneur de l’équipe de France, il fit appel à lui lui octroyant ainsi le statut d’international. Jean-Claude a vu sa carrière malheureusement gâchée par un vilain coup de coude du nîmois Mendoza qui le blessa gravement à l’oeil.

Maudit Mendoza !

Il aura tout de même réussi à garnir sa carte de visite d’un double titre de champion de France (1973 et 1977).

Son jeune frère, Patrice, ne connaitra pas la même réussite car bien qu’ayant intégré la célèbre pension mimosa à laquelle nous devons la formidable génération 1977, il ne put jamais véritablement intégrer l’équipe première.

Une histoire qui s’est répétée avec les frères Guyot.

Laurent, l’ainé ayant réussi à faire une carrière de footballeur professionnel honorable, participant activement à l’obtention du titre 1995 tandis que le cadet, Erwann,  pourtant très prometteur, échoua au moment de gravir la dernière marche vers le professionnalisme.

Enfin pour être tout à fait complet j’aimerais vous citer une autre fratrie mal connue des supporters car elle remonte désormais à quelques décennies. Ils furent en effet jadis trois frères à avoir porté le maillot jaune à liseré vert dans les premières années d’existence du FC Nantes. Ils nous venaient de Lesneven, se prénommaient Eugène, Léon et Jean, Abautret étant leur nom.

Mais cela est une histoire sur laquelle je compte revenir bientôt !

;-)

Voilà donc recensés ces liens de consanguinité qu’on nous jette aujourd’hui à la figure, ne manquant pas d’insulter l’ensemble des joueurs et dirigeants qui ont élevé le FC Nantes au sommet du football français.

Vraiment pas de quoi fouetter un chat, vous en conviendrez, la plupart des clubs français pouvant citer au moins autant de cas de ce genre.

Ainsi à la volée pouvons nous signaler les frères Revelli de la grande époque des Verts, Georges et Bernard Lech à Lens. Les Zvunka, Jules et Victor ont été sacrés champions de France avec l’OM au début des années 70, une période où sévissaient Raymond et Albert Domenech à l’OL, victorieux de la Coupe de France 1973 :-( .

Le Stade de Reims avait même poussé le vice jusqu’à aligner trois frères dans la même équipe, les Sinibaldi (dont l’un rejoindra ensuite le FCN).

A l’étranger nous pensons aux jumeaux René et Willy Van de Kerkhof finalistes vaincus du Mundial 78.

Plus heureux furent les frères Forster, Karl-Heinz et Bernd sacrés champions d’Europe des Nations en 1980 avec la RFA.

Autant de cas glorieux qui prouvent qu’il peut y avoir du bon parfois dans la consanguinité !

Du reste à ce que sache le Milan AC n’a pas eu à se plaindre de la lignée des Maldini !

Même sur le plateau de Téléfoot on sait ça….

Tags: , , , , , , , , , , ,

Laisser un commentaire

Vous devez être connecté pour publier un commentaire.