Gergotich Martial - Héros Brestois, pionnier Nantais

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Joueur du FC Nantes de 1943 à 1947.

Martial Gergotich “Gergo” est le symbole de la filière finistérienne qui a permis le lancement du football professionnel à Nantes. Il est surtout la figure emblématique de l’AS Brestoise : son club de cÅ“ur auquel il a consacré toute sa vie et donné ses lettres de noblesse.

né le 22 septembre 1919 à Brest
décédé le 20 août 1997 à Brest
Pré-sélectionné en Equipe de France
Champion de l’Ouest en 1945 avec le FC Nantes
Vainqueur des Jeux de la Communauté en 1960 comme entraineur de l’Equipe de France Amateur.

Carrière à Nantes :
1943-44 (DH Ouest) : ? matchs pour ? buts
1944-45 (Ligue Anjou) : ? matchs pour ? buts
1945-46 (D2) : ? matchs pour ? buts
1946-47 (D2) : ? matchs pour ? buts

Club précédents :
?-1934 : Avenir Brest
1934-37 : AS Brest
1937-39 : Stade Briochin (DH)
1940-41 : Association Sportive de Brest
1941-43 : St Pierre de Nantes (CFA)

Clubs après le FCN :
1947-48 (D1) : Olympique Alès (? matchs pour 3 buts)
1948-51 (D2) : Olympique Alès
1951-56 : AS Brest (DH puis CFA) comme Entraineur-joueur
1956-63 : AS Brest (CFA) comme Entraineur
1960- Entraineur de l’Equipe de France Amateur (vainqueur des premiers jeux de la communauté)

Né à Brest, Martial Gergotich y a grandi, il y a aussi découvert une grande passion : le football. Son premier club fut l’Avenir de Brest où il joua jusqu’à l’âge de 14 ans. De ses débuts, il a gardé le souvenir de matchs joués en brodequins parce que “les chaussures de foot c’était encore cher “. Mal équipé, « Gergo » occupait alors le poste de gardien de but, une place où l’absence de crampons était moins pénalisante. Il rejoint ensuite l’AS Brestoise, le grand club de la cité navale, pour lequel il joua son premier match en équipe première en mai 1936 comme avant centre. Ses obligations militaires le forcèrent alors à émigrer vers Saint-Brieuc où il passera 3 ans avant la déclaration de la guerre. Pendant qu’il était sous les drapeaux le jeune finistérien continuait de pratiquer son sport favori sous les couleurs du Stade Briochin qui évoluait à ce moment là en Division Honneur.

Puis vint la guerre et en décembre 1940 la démobilisation. « Gergo » revint alors à Brest, une ville dévastée où le football n’était plus une priorité.

“J’avais 24 ans. Démobilisé en 1940, j’étais retourné dans le Finistère. Mais il n’y avait pas de boulot et, comme le football n’offrait pratiquement aucun débouché, je crevais de faim et d’ennui. C’est alors que la Saint-Pierre m’a proposé deux places : l’une dans son équipe, l’autre dans une entreprise de travaux publics. J’ai accepté sans hésiter d’autant que d’autres Finistériens opéraient à la Saint-Pierre, laquelle essayait de monter une bonne équipe.”

Martial déménagea donc pour Nantes, heureux et fier d’aller jouer dans un club qui évoluait en Championnat de France Amateur. Entre 1941 et 1943 Martial Gergotich fit donc partie de l’effectif des « Pierrots » qui servira d’ossature à la première équipe du Football Club de Nantes. Pendant l’été 43, « Gergo », ainsi que plusieurs de ses équipiers du stade du Vivier (parmi lesquels nous pouvons citer : Kerdraon et Le Fur) va échanger la tunique rouge et bleue de la St Pierre contre le maillot jaune et vert du FC Nantes. Il connaît donc les premiers pas de ce nouveau club appelé à devenir bien plus tard l’un des fleurons du football français.

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Gergo sous le maillot du FCN en 1943

Au FC Nantes Martial est sous les ordres d’ Aimé Nuic, un entraîneur ancien international qui connait bien son sujet. Cette rencontre entre les deux hommes va provoquer la naissance d’une vocation future chez “Gergo”, celle d’entraîneur :

«Avant de connaître Nuic je n’avais jamais entendu parler de tactique. J’avais toujours joué n’importe comment. On rentrait sur le terrain et en avant la musique ! Je n’avais connu que des clubs où les dirigeants remplissaient la fonction d’entraineur, qu’ils considéraient d’ailleurs comme accessoire. Ils étaient bien gentils et dévoués mais enfin ils ne possédaient aucune compétence. Avec Aimé Nuic, j’ai vraiment découvert le football. Il nous faisait pratiquer le WM, c’était le système à la mode. J’appartenais à ce que l’on appelle le “carré magique”, c’est à dire la partie de l’équipe comprenant les deux inters et les deux demis. Je jouais à l’un de ces derniers postes, à côté de mon copain Kerdraon et j’étais plus particulièrement chargé des besognes défensives ».

«Nous n’étions pas intégralement professionnels. La plupart des joueurs occupaient un emploi en dehors du football. La situation économique était difficile et nous étions peu payés. Nos salaires n’avaient vraiment rien à voir avec ce qui se pratique à présent. Il y avait encore des cartes de ravitaillement et, lorsque nous partions en déplacement, nous emportions nos provisions. On voyageait en troisième classe et c’était vraiment parce que la quatrième n’existait pas ! Le match achevé, on repartait le dimanche en fin d’après-midi et le trajet était parfois fort long. Le lundi matin, au boulot, on avait les petits yeux. C’était ma jeunesse… »

«C’était pour moi une découverte, dit il, le foot pouvait être un métier . »

«J’ai signé avec le FCN un contrat semi-professionnel et lorsque je ne jouais pas au football, j’étais magasinier dans une entreprise de travaux publics. En 1945, j’ai été contacté par Reims qui me proposait un contrat professionnel et un fabuleux salaire de 9.000 F par mois. Mais je n’ai pas pu partir, étant lié par contrat au FCN. Il faut dire qu’à cette époque, les joueurs ne décidaient pas de leur carrière. Les transferts se discutaient entre les clubs et la décision était prise pour le joueur. »

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En 1944, avec Antoine Raab

Malheureusement au terme de 4 années passées chez les canaris, le FC Nantes connaît des ennuis financiers en fin de saison 46-47. Le refus de soutien de la municipalité nantaise oblige le club à vendre ses meilleurs éléments. Martial étant l’une des pièces maitresses du onze nantais (il en porte même le brassard), Marcel Saupin n’a aucun mal à trouver acquéreur pour le finistérien. L’Olympique d’Alès, qui vient de finir second en Deuxième Division, est promu en D1 et cherche à renforcer son effectif. Les deux parties tombent d’accord : pour 650.000 francs, Martial Gergotich devient cévenol .

Ce changement de club permet à Martial de connaître sa consécration en tant que joueur. L’Olympique d’Alès, club professionnel alors entrainé par Pierre Pibarot (le futur entraineur de l’Equipe de France), évolue durant une saison en D1. Bien que médiocre (l’Olympique ne réussissant pas à éviter la relégation), cette première saison chez les gardois permet à Martial de tirer quand même son épingle du jeu (peu convaincant de son équipe), et lui vaut d’obtenir une présélection en équipe de France qui ne se concrétisera malheureusement pas par une cape chez les Bleus.

Dommage, Gergo poursuit donc sa carrière pro à Alès en D2 et retrouve donc au moins deux par saison ses anciens coéquipiers nantais.

Est-ce parce qu’il a côtoyé deux entraineurs de la trempe de Nuic et de Pibarot que Martial Gergotich décide de passer à son tour ses diplômes d’entraineur à partir de 1950 ? On peut le penser, c’est d’ailleurs comme major qu’il sort du stage régional d’entraîneur d’Aix-en-Provence, obtenant le droit de participer au stage national à Reims. En Champagne Martial obtient avec brio son diplôme fédéral (5ème d’une promotion qui comportait aussi Mercier, Bini ou Firoud). Ce brevet lui permet alors de pouvoir envisager entraîner des équipes de tous niveaux.

«C’est un sacerdoce, je n’aurais pas pu faire autre chose. »

A 32 ans et fraichement diplômé, Martial apprend que son club d’origine, l’AS Brestoise, cherche à remplacer son entraineur. Il reprend ainsi contact avec ses anciens dirigeants et ne tarde pas à retrouver sa ville de naissance. Le 1er juillet 1951, il devient l’entraîneur de l’AS Brest, un club qu’il ne quittera plus jusqu’à la fin de sa vie. Au sein du club brestois, Martial Gergotich dirige l’entraînement de toutes les équipes et en tant que secrétaire administratif doit s’occuper d’un important courrier. Il n’aime guère alors qu’on lui demande s’il exerce un second métier.
«Tous mes joueurs travaillent, donc pas de problème, l’entraînement a lieu le soir après la journée. Exceptionnellement le midi, surtout l’hiver, mais cela est difficile car l’intervalle de temps est très court. Les minimes viennent le jeudi matin et , l’après-midi de ce même jour est réservée à l’école de football pour les poussins et les pupilles. En ce qui concerne les jeunes, je suis aidé par des joueurs qui sont professeurs d’éducation physique. »

Lorsque Martial prit en main l’équipe première de l’ASB, celle-ci jouait en Division d’Honneur. Sa première saison d’entraîneur fut couronnée de succès : l’équipe fut Championne de l’Ouest et obtint l’accession en Championnat CFA. C’est à ce niveau, le plus haut chez les amateurs que les Bleus de Brest vont se maintenir pendant de nombreuses années à la satisfaction de Gergotich et de ses dirigeants.

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1951 : Entraineur-joueur à l’ASB

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Saison 1952-53 : Gergo en position de dernier défenseur

« Gergo » rencontre aussi le succès dans la politique de formation qu’il mène avec son club, obtenant une bonne douzaine de titres de champion de l’Ouest chez les équipes de jeunes ainsi que de deux places de quart-de-finaliste de la Coupe Gambardella.

Jusqu’en 1956, Gergotich continue d’évoluer au sein de l’équipe de CFA en tant qu’entraineur-joueur. Les saisons suivantes il se contentera d’entrainer même s’il continuera de pratiquer chez les vétérans du club.

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1956 : sa dernière saison comme entraineur-joueur

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Devant ses qualités indéniables d’entraîneur, Martial se vit confier, en 1960, la responsabilité des joueurs de l’équipe de France Amateur afin d’aller participer, à Madagascar, aux jeux de la Communauté Française. Ce tournoi regroupait la France ainsi que toutes les anciennes colonies françaises.

«A mon époque, il n’y avait pas d’entraîneur déterminé pour s’occuper à temps complet de l’équipe de France. Nous étions nommés pour diriger l’équipe à un moment donné. Je me suis occupé également de l’équipe de l’Ouest Amateur . »

Le regard bleu de Gergo s’éclairait lorsqu’il lui arrivait d’évoquer la cérémonie de remise des prix des premiers jeux de la communauté en 1960 à Madagascar. Philibert Tsiranana remet en personne le trophée à Martial Gergotich qui, en qualité d’entraîneur, à conduit l’équipe de France « amateur » à la victoire.

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1960 : Martial et ses Bleus croqués

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1962 : à 43 ans Gergo est le patron incontesté du football brestois

1963 est une année faste pour l’ASB. qui accède en même temps au quart de finale de la Coupe de France et à la finale du championnat de France amateurs. En Coupe de France les ” Bleus de France ” (surnom des joueurs de l’ASB), sous la direction de Martial, éliminèrent le prestigieux Racing Club de Paris en huitième de finale (1-0).C’est l’apothéose…Malheureusement à la veille des quarts de finale, opposant Brest à Toulon, Martial est terrassé par une hémiplégie et doit abandonner ses joueurs, atteints moralement et éliminés par les toulonnais (0-1). Cette saison d’euphorie se terminait donc au plus mal et marquait la fin de carrière d’un entraîneur à l’apogée de sa gloire.

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Au temps où Martial règnait en maître sur Ménez-Paul

Après plus d’un an de grosses difficultés physiques, Martial se rétablit progressivement et revint au Stade de Ménez-Paul, non plus en temps qu’entraîneur mais afin d’aider les jeunes joueurs en leur faisant profiter de son expérience et en continuant de les former selon ses conceptions à l’origine du label de qualité “École de l’ASB.” Il est aussi sollicité par le District du Finistère pour ses qualités de technicien et de fin pédagogue à la détection. Avec les sélections départementales il eut, notamment, sous sa coupe les Le Roux, Le Guen, Colleter, Guérin, Martins.
On venait de détruire Ménez-Paul lorsqu’en 1997, Martial s’est éteint. Le sport brestois perdait ainsi deux de ses monuments les plus fameux. C’est toute une page de l’histoire du football brestois qui se tourne avec le décès de celui qui affirmait :

«Mon cœur est bleu, comme la couleur de mes yeux. »

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Pour en savoir plus sur Martial Gergotich et la grande histoire de l’AS Brestoise :

Le site officiel de l’ASB

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Un commentaire pour “Gergotich Martial - Héros Brestois, pionnier Nantais”

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